honorer notre féminin sacré
Nous vivons dans un monde rempli de contradictions. La tradition peut à la fois nous enfermer et nous enseigner. Il nous faut donc faire preuve de discernement. Le fait est que nous nous sommes coupés de traditions millénaires qui portaient en elles le sens sacré et fondateur pour une jeune femme du rituel de passage. Nirmala Gustave, relaxologue, nous explique : « il n’y a rien en Occident pour honorer la puberté. Juste un grand vide. En Inde, il existe un magnifique rituel de passage. La jeune fille est honorée comme une déesse. On la pare de son premier sari, on lui offre un massage, une friction du corps, pour qu’elle se sente bien dans sa corporalité de toute jeune fille. On l’honore grâce à des cadeaux, à un rituel. On met en mouvement cette nouvelle énergie de jeune fille et de future femme (…)
Paule Lebrun, fondatrice de « Ho, rites de passage » a beaucoup réfléchi sur le sujet : « quand une jeune femme devient-elle adulte ? est-ce quand elle peut voter ? quand elle obtient son permis de conduire ? quand elle fait l’amour pour la première fois ? quand elle devient indépendante financièrement ? quand elle est menstruée pour la première fois ? ». Ces expériences sont toutes à leur façon des initiations, mais vécues sans l’encadrement culturel et la signification existentielle qui leur étaient donnés dans les anciennes tribus. Nous devons donc trouver une nouvelle voie.(…) Oui, sans nul doute, la force symbolique du passage était autrefois plus forte. Particulièrement chez certaines tribus amérindiennes qui reconnaissaient la dimension sacrée de la femme : son lien intime avec les cycles de la nature, sa connaissance innée du processus d’engendrement des naissances et des morts, son pouvoir de donner la vie. Si cette reconnaissance du corps social n’existe pas, la femme peut oublier ce savoir.(…) honorer la femme et la féminité, ritualiser les grands passages de la vie d’une femme, et lui montrer combien la société est heureuse de l’accueillir. Telle qu’elle est. Etre une femme, non pas telle que la tradition ou la société la souhaite, mais comme chacune désire l’être. C’est sans doute ici l’apport de la révolution individuelle de la société occidentale qu’il nous convient aussi de préserver. Nourrissons-nous à la fois du sacré, du pouvoir du rituel, de l’initiation et des libertés âprement acquises par les féministes. C’est l’enjeu de ce troisième millénaire pour les femmes. Une alchimie pas si simple que ça à réaliser qui fera de nous des femmes initiées, épanouies et libres.(…)
Notre beauté devrait pouvoir nous rappeler un peu plus chaque jour que nous sommes « sacrées ». Le sacré nous ramène à une transcendance, au caractère absolument magique et mystérieux de notre existence. Par ailleurs ce qui est sacré est ce « qu’on ne doit pas violer, enfreindre ou divulguer ». Autrement dit, notre féminin est précieux, il doit être protégé. Et comme il a souvent été sacrifié (par les hommes et par les femmes), il doit aussi être honoré et réhabilité.
Delphine Lhuillier - LE FEMININ SANS TABOU