Le danger des changements cosmétiques
Au plan social ou organisationnel, tout changement qui n’implique pas l’émergence d’une nouvelle conscience est illusoire et risque de causer plus de problèmes qu’il n’en résout.
Malgré le fait que la collaboration ait une valeur incontestable par rapport à la compétition, l’état d’esprit dominant de nos sociétés et de nos organisations est encore la peur, la cupidité et la soif de pouvoir.
Ce que nous cherchons, ce n’est pas un changement cosmétique, mais carrément un éveil.
Il est fréquent de voir des réformes faire plus de victimes que le régime qu’elles voulaient corriger. Ces initiatives partent généralement d’une bonne intention et dégénèrent en cours de route. C’est ainsi que l’idéologie communiste a tué plus de 20 millions de soi-disant ennemis de la classe ouvrière. La démocratie qu’on veut imposer à des Peuples qui n’en veulent pas tue chaque jour des centaines de civils innocents. Les religions, elles aussi, ont conduit les hommes aux pires folies meurtrières avec le nom de Dieu à la bouche.
Conscient de ce danger, le mode sociocratique de gouvernance n’a d’intérêt que dans la mesure où il favorise l’émergence de cette nouvelle conscience tant souhaitée.
Il facilite cet éveil en reconnaissant d’abord la source du problème : la propension de l’homme à la domination pathologique et en proposant, pour contrer ce penchant destructeur, non pas tant d’adopter une nouvelle idéologie, mais de modifier la mécanique décisionnelle de nos organisations.
On peut se poser la question : est-il vraiment possible de convaincre des dirigeants à l’esprit pragmatique d’adopter un nouveau mode de gouvernance en leur expliquant qu’il favorise l’élévation du niveau de conscience ?
Il est certes important d’ajouter que le mode sociocratique de gouvernance a prouvé qu’il augmente la productivité. Quand on peut libérer l’intelligence collective, la capacité d’adaptation du groupe concerné augmente et du coup sa productivité augmente elle aussi.
Par ailleurs, les fraudes et autres délits économiques perpétrés ces dernières années par de grandes sociétés au-dessus de tout soupçon ont révélé que le manque de transparence de ces administrations était largement dû au mode de gouvernance qui les régissait. Ce sont là des arguments qui invitent à la recherche de nouvelles façons de prendre nos décisions.
De plus, depuis les années 80, une nouvelle génération de citoyens est en émergence. On les appelle : les créatifs culturels ! Ce groupe est composé majoritairement de femmes et ne répond plus aux conditionnements des idées dominantes. Ce sont des personnes plus éveillées et bien informées qui, à tous les niveaux de la société, contestent silencieusement le système et s’impliquent dans divers mouvements pour changer les choses. On les retrouve tant en politique que dans les affaires, les milieux sociaux, scientifiques ou littéraires. Ils cherchent à établir, partout où ils oeuvrent, une société plus écologique et forcément plus juste. (…)
Ce groupe est en croissance et forme la base sur laquelle peut aujourd’hui s’appuyer un mouvement pour une réforme en profondeur de nos organisations et de nos sociétés. L’éveil au pouvoir de l’intelligence collective n’est pas une nouvelle mystique réservée à un petit groupe d’initiés. C’est la base d’un véritable changement social.
Gilles CHAREST « la démocratie se meurt, vive la sociocratie »