RECONCILIATION

24/06/2013 08:50

Quand une violence se dépose précocement ou dans un moment de vulnérabilité, quand elle vient d’une personne chargée de sens, elle s’inscrit plus profondément, plus durablement. Elle imprègne alors toute une partie de notre relation au monde et peut susciter tout un système régressif ou agressif contre soi-même et envers autrui. Beaucoup de violences ainsi reçues secrètent des ramifications diverses et durables, sous forme d’auto violence en particulier. Quand la violence n’est pas redéposée, restituée, elle se retourne contre nous. Le mécanisme est d’une simplicité et d’une évidence implacables !

(…) Toute manifestation de l’extérieur sera ensuite décodée par le corps et l’esprit en fonction de son impact et de son retentissement dans les zones blessées de notre histoire.

Ainsi, un évènement anodin, une parole banale, un geste insignifiant, qui en d’autres circonstances serait passé inaperçu, pourra réveiller, restimuler les anciennes blessures et provoquer des cataclysmes intenses. La souffrance qui en découlera s’imposera à nous d’une façon totalement disproportionnée avec l’élément déclencheur (ce sera d’ailleurs un élément important à repérer. Si un évènement bénin, une situation banale déclenche une réaction inattendue, c’est que cet évènement, cette situation réveille une blessure du passé. Il ne servira à rien de gloser sur l’actualité, il nous faudra plutôt revenir à une écoute de notre histoire.)

Notre souci premier, notre préoccupation immédiate et urgente seront de vouloir réduire, supprimer cette souffrance en oubliant qu’elle est un langage ! Tout se passe comme si la souffrance (douleurs, symptômes, mises en maux), qui est le langage privilégié de la blessure, devait être bâillonnée…pour faire taire la blessure !

Ce processus nous confronte aujourd’hui à un véritable paradoxe en matière de santé. Ce qui est scientifiquement possible et parfois vivement réclamé, à savoir un traitement efficace et rapide, n’est pas toujours bon pour le malade si l’on considère son équilibre global. L’efficacité de certains médicaments ou de certaines interventions chirurgicales, qui réduisent la souffrance et font disparaître trop vite le symptôme, revient donc à bâillonner la blessure, à la censurer en quelque sorte, avant même que nous puissions entendre ce qu’elle criait, ce qu’elle nous invitait à entendre.

(…) Tout processus de changement impliquera la nécessité de se dépolluer de la violence ou des violences reçues au cours de nos différentes expériences de vie, à la fois pour libérer des énergies mais aussi pour se réapproprier un pouvoir d’influence sur sa propre vie.

Prendre soin des blessures ouvertes en nous déclenchera un processus de réconciliation, de réunification profonde. La recherche d’un mieux-être, le maintien d’un état de santé durable passent par un lâcher prise sur les ressentiments, par une dépollution des sentiments négatifs qui nous habitent, par un nettoyage de « la tuyauterie relationnelle » qui reste trop souvent encrassée par des situations inachevées et par la trace des violences reçues dans le passé. Ce nettoyage de la « tuyauterie relationnelle » intime constitue une des démarches les plus stimulantes de la vie.

Jacques Salomé "le courage d'être soi"